Machiavel, maître du réalisme

Lire Machiavel est rafraîchissant, surtout en plein été. Car Le Prince (écrit pour Laurent De Médicis en 1513), est une bonne douche froide contre les illusions et les conformismes rassurants.

Machiavel nous fait d’abord réfléchir à la chance. Nous surestimons le rôle de la chance, nous di-il. La fortuna est à peu près l’arbitre de la moitié de ce qui nous arrive. Le reste est affaire de préparation.

“Si vous vous en remettez à la chance, tôt ou tard elle vous abandonnera. Ne vous fiez jamais entièrement à la chance et ne vous abritez jamais derrière la malchance”

Machiavel aborde aussi ce que l’on appelle aujourd’hui l’asymétrie : Faut-il être gentil face à un méchant ? Faut-il tenter d’être bon face à un être mauvais ? Et un état doit-il se montrer compréhensif face à un état prédateur ?

Par exemple, faut-il être gentil et bon face à des hordes de sauvages qui ont perdu tout repère, qui sont à la limite du pathologique, qui sont dans la toute-puissance, à des “smicards du crime” surexcités et déchaînés qui agressent les médiateurs à un contre deux et qui sont prêts à tirer au calibre 12 sur tout ce qui bouge, pour venger un copain (7 août) ?

Faut-il être compréhensif vis à vis d’un adolescent qui conduit sans permis à vive allure et en sens interdit, tous feux éteints en pleine nuit, qui grille des feux rouges et des stops, et qui se jette dans le Seine pour échapper à une patrouille de police, alors même qu’il ne sait pas nager ? (10 août

Si nous étions compréhensifs, que deviendrait la responsabilité individuelle ? Et la responsabilité n’est-elle pas le prix de la liberté ? Qui donc voudrait être moins responsable et en même temps moins libre ?

Il y a une véritable obsession du comportement moral et vertueux, parce qu’il est rassurant, nous dit Machiavel. Mais ni l’éthique, ni les beaux discours ne peuvent nous préparer aux temps qui viennent “Vous êtes à coté de la plaque. Arrêtez donc d’être gentils face à des gens qui ne le comprennent pas. Vous êtes dans le monde réel, faites avec et préparez-vous”

Bien se préparer au sens d’une bonne politique et d’une bonne conduite de vie, ce n’est pas espérer le meilleur, comme le voudrait la pensée positive, c’est imaginer une stratégie capable de bien gérer le pire. Il faut casser les règles du comportement conventionnel et rassurant (être optimistes, bons et gentils), nous dit Machiavel. Le succès n’est pas le fruit de bonnes intentions, mais d’actions efficaces.

“Les dirigeants ne doivent pas attacher de valeur morale à leurs idées. S’ils le faisaient, ils ne pourraient pas faire de compromis, nous dit encore Machiavel. Diriger, c’est choisir entre ce qui est désastreux et ce qui est désagréable. Tenir ses promesses, tenir parole, dire la vérité, c’est formidable, mais cela ne vous mènera pas bien loin. Dire toujours toute la vérité est tout simplement impossible. Il faut à la fois savoir dire la vérité et savoir mentir, et savoir à quel moment le faire”

“Les faits et les résultats priment toujours sur les intentions, ajoute Le Prince. Ne soyez donc pas bien-pensants, soyez mieux-pensants ” Revigorant. Bonne rentrée !

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1 réponse à Machiavel, maître du réalisme

  1. Martine dit :

    Je voudrais rappeller le sens premier du mot vertu qui vient du latin virtus “énergie morale, force” le sens moral est apparu dans un contexte chrétien : donc être vertueux ce n’est pas si mal !
    Ce message de rentrée est peut être revigorant mais on aurait aimé quelque chose de plus “light”…
    Une superficielle.

    Pourquoi pas des mariages light, des politiques light, des idées light, des combats de rue light et des dépressions light…

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