Salim Ejnaïni n’a pas grandi à la lumière du jour. II avait 6 mois quand les médecins ont annoncé à ses parents qu’il était atteint d’un cancer de la rétine. Les opérations et les traitements n’ont pu sauver sa vue.
À 16 ans, il a été plongé dans le noir. “Des lors, tous les clignotants étaient au vert”, dit-il drôlement. Au lieu de se laisser abattre, il est monté à cheval. Franchissant un à un tous les obstacles, il est parvenu à son but : participer à des compétitions de cavaliers valides.
Seule la voix de crieurs lui indique les haies à sauter. Il raconte cette longue cavalcade dans un livre coup de fouet : “L’impossible est un bon début” (Fayard). On en recommande la lecture à tous les geignards de notre époque.
La plainte est une pose de vie célébrée. La victime est érigée en modèle. Revendiquer des droits, exiger des dommages et intérêts, réclamer réparation, tels sont les symptômes de nos temps doloristes.
Salim Ejnaïni lui, ne se plaint pas ; “Calme, en avant, droit“, selon la devise du Cadre noir de Saumur. “Mon royaume de la nuit pour un cheval ” aurait soufflé Shakespeare.
Mais où ce jeune homme va-t-il puiser cette volonté, cet humour et ce sens de la dérision à toute épreuve ? II s’est forgé une “forteresse de solitude” dans laquelle il se réfugie et puise ses forces. II lui a fallu d’abord survivre puis vaincre la peur qu’il inspirait.
“L’équitation, raconte-t-il, renforçait en moi ce sentiment de construire quelque chose, de miser sur mon avenir et de bâtir par tous mes apprentissages celui que j’allais devenir” ; Quelle cavalcade! Salim Ejnaïni a beau être privé de champ visuel, il voit haut, il voit loin.
II apprend désormais à piloter des avions. Cessons de gémir ! À cheval avec ce cavalier blessé ! Et maintenant au galop !