France pessimiste et France optimiste

Plusieurs explications sont données pour comprendre le clivage qui existe entre les électeurs de Marine Le Pen et ceux d’Emmanuel Macron.

La thèse “des gagnants de la mondialisation contre les perdants” met en avant un groupe de citoyens qui disposent des ressources économiques, sociales et culturelles nécessaires pour affronter avec sérénité la mondialisation et en bénéficier.

Les “perdants de la mondialisation” regroupent les personnes dont les conditions d’existence sont traditionnellement protégées par les frontières nationales, ainsi que celles qui sont le plus attachées à la culture et à l’indépendance nationale.

Une autre thèse plus classique, insiste sur un vote de classe, les classes populaires (faible niveau de richesse matérielle) plébiscitent un vote frontiste et les classes privilégiées ou possédantes se tournant vers M. Macron.

Mais alors comment expliquer la forte pénétration du vote frontiste parmi des catégories aussi différentes que les jeunes, les classes moyennes ou la France périurbaine et rurale ?

Des chercheurs spécialistes de sociologie électorale démontrent dans une étude inédite (juillet 2016-avril 2017) que le choix dépend autant de leur optimisme ou de leur pessimisme que de leur situation matérielle et de leur niveau de vie. Cette étude fait apparaître un véritable clivage entre la France pessimiste, qui vote Le Pen, et la France optimiste qui vote Macron.

Le vote FN n’est pas seulement celui des classes populaires, mais surtout celui des classes malheureuses et pessimistes. A l’inverse, le vote Macron n’est pas seulement celui des riches, mais aussi celui des optimistes. Autrement dit, il s’agit de deux perceptions opposées de l’avenir.

Que l’on dispose d’un revenu élevé ou bas, que l’on soit employé, chômeur ou retraité, que l’on soit ouvrier, employé ou cadre moyen, la probabilité de voter Le Pen augmente avec le niveau de pessimisme.

Au contraire, si le vote Macron est plus élevé chez les électeurs ayant des revenus élevés, il diminue systématiquement à mesure que le pessimisme augmente, quels que soient les groupes concernés et quels que soient le statut d’emploi et la catégorie socioprofessionnelle.

Le pessimisme ne s’explique pas seulement par les variables socio démographiques traditionnelles, telles que le revenu ou l’emploi, ni par des valeurs idéologiques de repli. Ce pessimisme s’explique surtout par la crise des aspirations qui, suite à la crise financière et économique qui dure depuis maintenant dix ans, a gagné des électorats très divers, et en particulier les individus moins diplômés.

Ce pessimisme s’explique également par des politiques économiques inadaptées après la crise financière de 2008. Dès lors, l’une des clés du prochain quinquennat pour lutter contre le pessimisme d’une bonne partie des Français sera de ne pas casser la reprise de la croissance. Il est impératif de ne pas briser, une nouvelle fois, l’espoir d’un avenir meilleur.

D’après Le Monde, mai 2017
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