Il en fallait de l’énergie et de l’optimisme au marquis de La Fayette 23 ans, et à ses compagnons d’armes pour embarquer sur l’Hermione, il y a deux siècles et demi, le 20 mars 1780, pour aller prêter main forte aux insurgés américains.
“Du premier moment où j’ai entendu prononcer le nom de l’Amérique, je l’ai aimée et dès l’instant où j’ai su qu’elle combattait pour la liberté, j’ai brûlé du désir de verser mon sang pour elle” disait le fougueux marquis, convaincu que rien n’est impossible.
L’Hermione est alors une frégate de trois mâts, longue de 65 mètres, équipée de 2.200m2 de voiles, armée de 34 canons, et dont la forme de la coque explique les performances exceptionnelles, nettement supérieures aux voiliers britanniques de l’époque.
Après quatre mois de traversée, La Fayette débarque à Boston pour annoncer l’envoi de renfort français au général Washington. Et le 21 juillet 1781, c’est du banc de quart arrière, rouge sang de l’Hermione, que debout face à la mitraille, le commandant Latouche-Tréville (futur vice-amiral et commandant en chef de la marine de Napoléon), galvanise ses hommes durant l’assaut, quand les boulets anglais de 12 livres pleuvent sur le gréement et dans les matures de la frégate, au large des côtes américaines.
Il en fallait de l’énergie et de l’optimisme il y a 23 ans, en 1992, quand quatre copains sans un sou en poche, font “le serment d’ivrogne” de reconstruire l’Hermione à l’ancienne.
“Nous avons mis cinq ans à bâtir le projet et à le tester auprès d’éventuels financeurs, se souvient Benedict Donnelly. On nous voyait comme des fadas” ; Un patron d’entreprise François Asselin, finira par relever le défi et construira la frégate tranche par tranche au gré des budgets débloqués, acceptant l’incertitude financière.
Pendant ce temps, Donnelly se démène sans compter pour intéresser parlementaires et mécènes. Et Henry Kissinger acceptera d’être président d’honneur des “Friends of Hermione in America”
Démarré en 1997, le chantier fut un spectacle prodigieux. Plus de quatre millions et demi de personnes sont venues et revenues payer cinq euros pour voir travailler les charpentiers, forgerons, ébénistes, gréeurs, voilières … Un incroyable succès populaire qui a permis d’autofinancer ce projet fou, de 40 millions d’euros.
Le samedi 18 avril 2015, la fière Hermione après 23 ans d’attente a repris la mer vers le Nouveau Monde. Grâce à l’énergie et grâce à l’optimisme. L’un nourrissant l’autre, car il ne peut pas avoir d’optimisme sans énergie, ni d’énergie sans optimisme…